C’était un soir, sur les bords de l’Isère,

Un soldat belge qui montait la faction.

Vint à passer trois gardes militaires

Parmi lesquels était le roi Albert.

« Qui vive là lui dit la sentinelle

Qui vive là vous ne passerez pas !

Si vous passez, craignez ma baïonnette.

Retirez-vous vous ne passerez pas.

Retirez-vous vous ne passerez pas, halte là ! »

 

Le roi Albert en fouillant dans sa poche :

« Tiens lui dit-il et laisse-moi passer. »

« Non, non ! lui dit la brave sentinelle.

L’argent n’est pas pour un vrai soldat belge.

Dans mon pays, je cultivais la terre,

Dans mon pays, je gardais les brebis.

Mais maintenant que je suis militaire,

Retirez-vous vous ne passerez pas.

Retirez-vous vous ne passerez pas, halte là ! »

 

Le roi Albert dit à ses camarades :

« Fusillons-le c’est un mauvais sujet

Fusillons-le à la lueur des astres

Fusillons-le c’est un mauvais sujet ! »

« Fusillez-moi, lui dit la sentinelle.

Fusillez-moi vous ne passerez pas !

Si vous passez, craignez ma baïonnette.

Retirez-vous vous ne passerez pas.

Retirez-vous vous ne passerez pas, halte là ! »

 

Le lendemain au grand conseil de guerre,

Le roi Albert lui demanda son nom.

« Tiens, lui dit-il, voilà la croix de guerre,

La croix de guerre et la décoration. »

« Que va-t-elle dire ma bonne et tendre mère ?

Que va-t-elle dire en me voyant si beau ?

La croix de guerre est à ma boutonnière,

Pour avoir dit vous ne passerez pas.

Pour avoir dit vous ne passerez pas, halte là ! »